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Chômeuse sur le divan
13 mai 2020

De la richesse à la pauvreté

Les reportages étaient l’occasion de rencontrer les confrères et consœurs de la presse écrite quotidienne et hebdomadaire, de la radio, de la télévision. J’ai vite sympathisé avec les deux journalistes du petit journal local. Ils me racontaient souvent leurs conditions de travail difficiles. Je les écoutais avec une certaine empathie mais à vrai dire je ne me rendais pas compte de la réalité.

Lorsque mon contrat dans le grand média prit fin au bout de dix-huit mois, ces deux confrères ont pensé à moi pour effectuer des remplacements dans leurs agences départementales. « Ce n’est pas terrible, ne te fais pas d’illusion, il n’y a pas d’embauche car on n’a pas un rond », m’avaient-ils prévenu. J’acceptais leur offre sans hésiter car on me proposait du travail et je continuais à être dans le circuit médiatique.

 

Il n’y a eu qu’un mois de battement entre la fin de mon CDD dans le grand journal et le début du contrat dans le petit. J’ai commencé un jour de décembre, un mercredi, dans l’agence située dans la ville-préfecture, à trente minutes de chez moi. Je ne me souviens pas avoir été particulièrement stressée contrairement au rédacteur qui m’a accueillie. Surmené, il était ravi d’avoir un peu d’aide. « Je n’aime pas les mercredis, je suis tout seul », m’avait-il confié sur le pas de la porte en roulant une cigarette.

L’agence était située en centre ville, dans une ancienne bijouterie. De ce commerce subsistaient un store en matière plastique éventré, un mobilier années 80, des placards, de grands tiroirs, une vitrine où journaux et affiches avaient remplacé montres et bracelets et un coffre-fort. A l’abri dans un placard, cette antiquité ne pouvait être déplacée. Les dossiers s’y amoncelaient. L’unique pièce qui faisait office d’open space était mal éclairée par de petites ampoules à led fixées sur des rails, eux-mêmes accrochés au mur. Certaines étaient grillées. Au plafond, une toile couleur sale cachait la misère ! Au sol, un lino de la même teinte avait aussi cette vocation. A gauche, un bureau datant des années soixante était recouvert d’autocollants militants. Les journaux y étaient lancés en vrac à côté d’un i Mac bleu turquoise.

bazar

Dans le fond, séparé par un radiateur, se trouvait le bureau de la cheffe d’agence. A droite, trois grandes tables collées les unes aux autres, accueillaient les ordinateurs de deux rédacteurs et de deux SR (secrétaires de rédaction) ainsi qu’une imprimante à deux sous. Le labo photo avait été improvisé dans l’arrière boutique. S’y trouvaient les toilettes et un évier noirci par l’usage répété des produits chimiques. Dans l’ensemble régnait un bazar incroyable qui m’a sauté aux yeux en entrant. Les livres étaient entassés dans ce qui faisait office de bibliothèque. Des dossiers de presse s’empilaient dans chaque recoin avec des blocs notes.

Un bar dissimulait un fax dont la sonnerie et le bruit des rouleaux en impression me sortirent de ma distraction. « Tu as rendez-vous dans une demi-heure au Centre de Formation des Apprentis pour un petit déjeuner pédagogique », m’annonça mon nouveau collègue en fouillant dans l’agenda.

Dans cette petite entreprise en pleine crise, pas de voiture de service pour les journalistes. Trop onéreux. « Soit tu y vas avec la tienne, soit tu covoitures avec un confrère du grand journal ». J’optais pour le covoiturage.

 

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Commentaires
M
N'étant pas patron de presse (du moins pas encore, on ne sait jamais de quoi sera fait demain!), je ne peux vous apporter que des encouragements!
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R
C'est vraiment livresque cette histoire merci de nous le partager !
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Chômeuse sur le divan
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